Observer les pratiques évaluatives des enseignants

Sophie GENELOT – IREDU - Mars 2019

Difficile d’aborder la notion de correction sans penser à l’évaluation, notamment dans un contexte formatif.

Si les rapports de recherche sont rares sur la question, l’IREDU de Bourgogne a publié un rapport à destination du CNESCO (Conseil National d'Évaluation du Système SCOlaire) abordant la question des pratiques de classe.

Quelques éléments figurant dans la conclusion de ce rapport doivent nous interpeller et apporter une conclusion, toute provisoire, à cette question de la correction...

Au niveau élémentaire, en revanche, c’est sous la forme d’interactions évaluatives entre les enseignants et les élèves que se déroule, très majoritairement, l’activité évaluative. Dans la plupart des classes élémentaires, ces interactions évaluatives se déroulent le plus souvent sous une forme simultanée (l’interaction ayant lieu au cours de la réalisation de la tâche par l’élève) plutôt que sous une forme différée (l’intervention de l’enseignant intervenant à l’issue de la production de l’élève).

Enfin, les activités d’auto-évaluation et d’évaluation entre pairs, bien qu’évoquées par la plupart des enseignants lors des entretiens restent, à l’exception de deux classes, des formes relativement marginales de l’activité évaluative des classes observées.

Ainsi donc, au plan des représentations des enseignants, telles que nous avons pu les appréhender à travers leurs propos décrivant leurs pratiques évaluatives lors des entretiens, ce sont les modalités les plus formellement et explicitement évaluatives qui occupent la part prépondérante.

Cependant dans la réalité des pratiques telles que nous avons pu les observer, ce sont bien les formes les plus diffuses de l’évaluation, celles qui se déroulent lors d’activités ordinaires, voire banales, qui apparaissent constituer la modalité principale de l’activité évaluative de la plupart des classes de notre échantillon.

(…) il n’est pas sûr que tous les autres aient une conscience claire du caractère évaluatif de ces activités qu’ils ne désignent pas, la plupart du temps comme telles, ni devant nous lorsqu’ils évoquent leurs pratiques, ni devant leurs élèves lorsqu’ils les leur présentent en classe.

Ce constat nous semble intéressant à plus d’un titre. D’une part, alors que les débats au sein de la communauté éducative, ainsi que les orientations, textes et dispositifs officiels concernent majoritairement ce type d’évaluations formelles (en se centrant par exemple, sur les outils de communication pour les parents, les référentiels, voire les formes d’appréciation…), ces observations sont de nature à interroger la pertinence de ces injonctions, qui ne pourraient concerner, si l’on en croit ce que nous avons observé sur ces treize classes, qu’une part bien réduite de leur activité évaluative.

Ces constats révélés par ces premiers résultats de notre recherche présentent un second intérêt, nous semble-t-il, relatif à la formation des enseignants : déconstruire, chez ceux-ci, cette représentation majoritaire de l’évaluation, réduite à ses seules dimensions formelles et explicites, nous semble constituer un enjeu majeur.

Dans certains textes institutionnels récents (MEN, 2015a ; MEN, 2015b ; MEN, 2016) qui appellent de leurs voeux une évolution des pratiques évaluatives des enseignants, celle-ci semble, néanmoins, concerner une conception plus large de l’évaluation. Décrite comme devant constituer un soutien à l’apprentissage, cette qualification de l’activité évaluative est de nature à attirer l’attention sur d’autres formes, plus intégrées au processus d’apprentissage, que les seules évaluations formelles.